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09 Apr

MPP : le mythe de la puissance financière est mis à mal !

Publié par SAIDICUS LEBERGER  - Catégories :  #POLITIQUE

MPP : le mythe de la puissance financière est mis à mal !

Le MPP

C’est un lieu commun de dire qu’en politique, l’argent, c’est le nerf de la guerre. Organiser des meetings coûte cher, et maintenir une clientèle coûte encore beaucoup plus, surtout dans les environnements de pauvreté que sont nos pays. Les militants n’ont pas encore la culture politique pour comprendre qu’ils doivent cotiser pour soutenir leur parti.

Au contraire, ils attendent des leaders politiques non seulement de l’argent pour faire la politique, mais plus grave, de l’argent pour satisfaire à leurs besoins personnels. Au Burkina, le mode opératoire du CDP fondé sur la débauche de moyens à l’occasion des consultations électorales, a contribué à pervertir les citoyens et à installer dans l’esprit des gens cette idée que faire la politique est un moyen sûr de se faire une base financière.

clôture congrès MPP 2A peine né, le MPP est sérieusement confronté à la question. Indiscutablement, l’adhésion de certains individus et même les fusions de certains partis avec le MPP, s’appuie sur ce calcul de la part de beaucoup, que le MPP, à travers ses responsables, aurait beaucoup d’argent et le distribuerait sans compter à ceux qui le rejoignent.

Il faut dire que cette perception de puissance financière qui entoure le MPP a été favorisée par les leaders du MPP eux-mêmes.

D’abord, ils se vantent auprès de leurs proches d’avoir des amitiés solides qui seraient prêts à les soutenir financièrement.Ces proches colportent à leur tour ces informations et recrutent les militants sur cette base. La presse a d’ailleurs récemment publié une liste de chefs d’état de la sous-région qui leur apporteraient un soutien financier, au nom d’amitiés nouées depuis longtemps. Dans leur manière de faire, et surtout dans leurs tractations pour attirer à eux certains individus ou partis, les recruteurs du MPP laissent croire que l’argent ne serait pas un problème.

En regardant les différents meetings organisés ici et là, et les distributions gratuites de carburant qui les accompagnent parfois, les gens se disent que le MPP regorge de millions, voire de milliards.A l’occasion des rencontres avec les chefs coutumiers, le MPP a remis des enveloppes dont le montant a fait très vite le tour de la ville, renforçant une fois de plus la perception qu’il a de l’argent.

Certains responsables de partis ayant fusionné avec le MPP n’ont pas eu de gêne pour expliquer à leurs militants ou à leurs proches, qu’ils avaient décidé de se fondre dans le MPP tout simplement parce qu’ils n’avaient plus la capacité financière de faire fonctionner leurs partis.Certaines fusions auraient été arrachées à coup de millions. Il se dit même que les congrès tenus par tous les partis ayant fusionné avec le MPP auraient été pris en charge par les trois leaders du MPP.

En somme, ces leaders de partis venus au MPP se sont débarrassés du fardeau qui pesait sur eux.C’est vrai que les responsables des partis qui sont allés frapper à la porte du MPP ne mènent pas large sur le plan financier. Certains sont des fonctionnaires de l’Etat dont les fins du mois sont très difficiles .D’autres sont des retraités qui ne disposent d’aucune fortune. Aucun de ces partis ayant fusionné avec le MPP n’a jamais mené une vraie campagne électorale dans ce pays ; à peine s’ils ont pu confectionner le moindre T shirt ou la moindre affiche.

C’est la même croyance en la richesse du MPP qui a incité beaucoup de citoyens à y émigrer ; des militants de base et des cadres ont délaissé leurs partis traditionnels qu’ils accusaient de ne rien donner, pour aller vers le MPP e espérant y trouver des ressources abondantes et inépuisables pour faire la politique.

De quelles ressources disposes actuellement le MPP ? Difficile de le dire puisque dans notre pays, la loi n‘oblige pas les partis politiques à publier des documents relatifs à leur situation financière.

La croyance des gens que le MPP est riche se fonde essentiellement sur le fait que ses trois principauxresponsablessont restés longtemps au cœur du pouvoir, et qu’ils auraient donc profité de cette présence pour amasser des fortunes. On les dit milliardaires, voire multimilliardaires. On dit qu’ils ont avec eux une légion d’opérateurs économiques qu’ils ont aidés quand ils étaientpuissants, et qui leur renvoient l’ascenseur.

De fait, du temps où les trois leaders du MPP étaient aux affaires, ils ont fait preuve de largesses financières à l’endroit de leurs amis et supporters, et beaucoup de ceux qui les rejoignent aujourd’hui avouent qu’ils le font par pure reconnaissance. Mais il y a une explication à cela.

Bras droit de Blaise Compaoré depuis 1987, Salif Diallo était le gestionnaire des fonds secrets du régime. Ces fonds étaient alimentés par des opérations externes et internes. A l’extérieur, on avait Kadafi, le Libéria, la Sierra Leone, Taiwan etc..A l’intérieur, on rançonnait les opérateurs économiques et les DG des grandes sociétés de l’Etat (SONABHY, SONABEL, ONATEL, …).

Le pouvoir vous donne un marché juteux, et ensuite vous avez l’obligation de verser des commissions pour alimenter la caisse noire. Et avec cette caisse noire, on finance les amis politiques, on soutient les petits partis politiques créés de toute pièce, on corrompt l’opposition, on provoque des scissions dans les partis d’opposition, on achète le silence ou la complicité des syndicats. C’est de cette caisse noire que proviennent sans doute les 30 millions que Salif a utilisé pour piéger Bado Laurent et le Chat noir du Nayala et faire exploser l’OBU. En bon politicien tissant sa propre toile, Salif au temps où il était tout puissant était très large avec de nombreux leaders politiques et de la société civile. Soit dit en passant, c’est quand François Compaoré a voulu récupérer ce système mafieux que la brouille s’est installée entre lui et les trois principaux leaders du MPP. Qui est fou ?

Quant à Simon, on imagine bien qu’il a mis à profit ses 18 ans à la mairie pour se faire du beurre. Le chantier de rénovation de la mairie que la cour des comptes a dénoncé en témoigne. Même s’il se dit prêt à répondre en justice, le peuple n’est pas dupe ! Comment peut –on réfectionner la mairie de Ouaga à plus d’un milliard de francs CFA.
La légende prétend que Roch Kaboré est issu d’une famille très aisée. On dit même, selon la formule consacrée, qu’il est né avec une cuillère d’or dans la bouche. La réalité est beaucoup plus nuancée. Certes, le père de Roch était un haut fonctionnaire bien rémunéré comparativement au commun des burkinabè. Il a occupé un poste ministériel sous le régime de Maurice Yaméogo et le poste de Vice-gouverneur de la BCEAO.Mais tout le monde sait que la génération à laquelle appartient son père ne s’est pas enrichie dans les fonctions de l’Etat.Et on ne part pas du poste de Vice-gouverneur de la BCEAO avec des milliards. De plus, Il n ‘a pas bât un empire financier, industriel ou commercial. S’il est vrai que Roch s’est enrichi, cela ne peut venir que de son passage à la BIB et/ ou des différents postes ministériels qu’il a occupés, toute chose qui nous ramène à l’enrichissement illicite. On comprend dès lors pourquoi sous sa présidence à l’assemblée nationale, il n’a pas daigné soutenir la loi sur le délit d’apparence proposée par l’honorable député Laurent Bado.

De fait, Roch, en plus de récolter les dividendes des privatisations fantaisistes qu’il a faites, a surtout utilisé les fonds de l’assemblée nationale pour recruter des soutiens parmi les parlementaires : carburant par ci, parrainage par-là, sans compter les différents marchés donnés dans des conditions bizarres, etc…Beaucoup d’anciens parlementaires qui vont au MPP le font par reconnaissance pour les enveloppes reçues du temps où Roch était président de l’assemblée. Il se dit que les fonds de l’Assemblée nationale ont été gérés avec un tel laxisme par Roch et ses différents questeurs que si la cour des comptes y mettait le nez, ce serait un vrai scandale d’Etat.

En plus de tout cela, lors des campagnes électorales, ces trois-là géraient le budget mis à la disposition du CDP et le distribuait à leurs fidèles comme ils le voulaient.

Aujourd’hui, Roch, Salif et Simon n’ont plus accès à ces fonds occultes. Or, une chose est d’avoir les poches pleines pour vivre grassement, une autre est de financer les amis politiques à grande échelle de sa propre poche. Jusque-là, ils faisaient la politique avec les fonds publics et pouvaient dépenser sans compter. Désormais, il faut sortir l’argent de sa propre poche et là, on est obligé de compter.

Ceux qui espéraient donc que les largesses d’antan vont se poursuivre se trompent. Les trois héros ne peuvent plus avoir la même puissance financière, même s’ils ont des affaires !

Mais il est surtout étonnant que nos politiciens , qui passent le temps à fustiger la corruption et l’enrichissement illicite, trouvent soudain acceptable d’aller au MPP pour le motif de pouvoir utiliser l’argent des dirigeants du MPP pour faire la politique. Après tout, si ces gens se sont enrichis, c’est sans nul doute par les détournements et la corruption. De ce point de vue, le plus incompréhensible, c’est sans doute l’attitude des partis d’opposition qui rejoignent le MPP pour des raisons bassement financières. A quoi cela sert-il de fustiger la corruption avec véhémence, pour ensuite, à la première occasion, rejoindre ceux-làmême qui étaient les principaux architectes du système de corruption ! C’est à ne plus riencomprendre, surtout de la part des sankaristes !

Mais le plus intéressant c’est que, au sein même du MPP, cette histoire d’argent commence à créer des problèmes sérieux.

Les militants et les responsables locaux se plaignentde plus en plus ouvertement que le parti ne « lâche pas les feuilles ».Les rassemblements du MPP donnent même parfois lieu à des foires d’empoigne, à cause de la modicité des enveloppes remises à ceux qui sont venus participer. Dans certaines provinces, on a assisté à des bagarres et les responsables locaux ont dû expliquer aux militants que eux n ‘avaient rien reçu du parti et que la rencontre avait été financée sur la base de leurs cotisations. Tout cela fait que la désillusion commence à s’installer chez certains militants et cadres car l’argent facile que certains espéraient n’existe pas !

Plus grave, cette histoire d’argent risque de diviser les leaders du MPP. Les hommes de Salif chantent partout que c’est leur champion qui supporte le poids financier de l’opération et que les deux autres leaders ne font rien. Si c’est vrai, cela veut dire qu’on aura très vite une crise de leadership, car Salif voudra forcément imposer ses vues. Déjà, les adjoints des deux autres leaders l’accusent de vouloir toujours imposer ses hommes dans les postes clés.

Apparemment, les responsables du MPP ont pris conscience du danger qu’il y a à laisser étiqueter leur parti comme étant riche et s’emploient à corriger le tir. Ils ont compris qu’ils ne pourraient pas tenir la distance à cette allure.
A Ouahigouya, le parti a annoncé de façon péremptoire que le meeting avait été financé par les cotisations des militants locaux, une manière de dire aux autres provinces qui voudraient faire des meetings, qu’ils doivent se débrouiller. A Ouagadougou et à Toma, on a fait dire aux jeunes qu’ils vont payer la caution de Roch, histoire de sensibiliser les militants à s’engager financièrement pour le parti.

Pourront-ils maintenir leurs nouveaux adhérents en tenant un langage de vérité ? Pas sûr car ils appartiennent au système qui a formaté l’esprit des burkinabè à suivre les partis non pour les programmes, mais pour les avantages distribués. Si comme on le constate de plus en plus ici et là les responsables locaux sont obligés d’y aller de leur poche pour financer des activités du parti, les rangs ne vont pas tarder à se dégarnir, parce que le MPP n ‘est pas un parti de militants convaincus, mais un parti de supporters intéressés. Ce nouveau ancien parti né il y a à peine deux mois fonctionne exactement comme le CDP en faisant une cour assidue aux bonnets rouges, aux opérateurs économiques…

Les principaux leaders du MPP ont bâti leurs carrières politiques sur les services rendus et les enveloppes distribuées. Et ayant donné aux gens l’impression qu’ils sont riches, ils sont obligés de continuer dans leurs largesses, s’ils veulent maintenir le mythe.Comment et Jusqu’à quand ? That is the question !

Zoetenga Lazaerius
Instituteur à la retraite
!

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