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11 Aug

Afrique de l'Ouest : ces confrères de la presse en ligne

Publié par SAIDICUS LEBERGER  - Catégories :  #DOSSIERS

Régulièrement, Le Point Afrique vous propose une revue de presse africaine. Distance oblige, c'est par le prisme de la presse en ligne que s'effectue cette moisson d'opinions et d'analyses de journalistes du continent autour d'un même fait d'actualité. Or, sur plus d'une cinquantaine de titres répertoriés, force est de constater que certains médias sont plus fréquemment cités que d'autres. Ils sont bien souvent béninois (Bénin Monde Infos, La Nouvelle Tribune), burkinabés (Aujourd'hui au Faso, Fasozine, L'Observateur Paalga, Le Pays) ou guinéens (Le Djely, ex-Guinée Conakry Infos).

Au-delà de la pertinence de leurs analyses, cette surreprésentation tient surtout à la place et au traitement « maison » qu'ils accordent à l'actualité panafricaine et internationale, quand d'autres sites sont plus focalisés sur l'actualité nationale. L'heure est donc venue de mieux les connaître, de comprendre pourquoi ils ont choisi de s'insérer dans ce secteur de la presse en ligne qu'on a coutume de qualifier de « précaire », et dont les modèles économiques tendent à se réinventer. Il s'agit aussi de mieux cerner leur vision, les enjeux politiques qui les préoccupent, et enfin ce tropisme panafricain. Nous avons donc sondé quatre d'entre eux (Bénin Monde InfosLe DjelyLa Nouvelle Tribune et Le Pays), dont nous dressons, pour commencer, une présentation sommaire.

Bénin Monde Infos (Bénin), un œil sur le monde

Prolifique, ce site d'informations produit chaque jour près d'une quinzaine d'articles sur le Bénin et l'Afrique dans un style concis et efficace. Il a été créé en 2015 par un groupe de professionnels des médias soucieux de répondre aux exigences de la classe moyenne urbaine. « On observait un désir d'avoir l'information à portée de main, de pouvoir y accéder très rapidement, surtout dans les grandes villes. Avec le boom des téléphones portables et des réseaux sociaux qui arrivent à ravir la vedette aux médias traditionnels, la presse en ligne avait un rôle à jouer », explique Bernadin Mongadji, directeur de publication de Bénin Monde Infos. Il ajoute que le site d'infos « se veut aussi une rampe de lancement à un journal papier ». Indépendant et financé par la publicité, Bénin Monde Infos compte une dizaine d'employés, dont six journalistes : à la fois des « anciens », expérimentés, et « une nouvelle génération de professionnels des médias ». Le desk Afrique, encadré par Christophe Sessou, se compose de deux personnes, et propose chaque jour environ cinq papiers sur l'actualité africaine (autre que béninoise). Un décryptage de l'actualité très synthétique, qui n'exclut pas le point de vue de la rédaction.

Le Djely (Guinée), « dépositaire de l'information »

Créé par deux professionnels de la communication et un journaliste, ce site d'infos guinéen à l'allure sobre est sur la Toile depuis février 2015. Le choix de s'orienter vers la presse en ligne procède d'un double constat : le moindre coût de lancement d'un média sur le Web, et les précieux avantages logistiques du télétravail pour le responsable éditorial du projet, Boubacar Sanso Barry, qui est une personne à mobilité réduite.

Le terme « Djely », qui signifie « sang » dans le Mandé, désigne le griot. Pour autant, ce site d'infos n'est ni proche des puissants ni prompt à la louange. « La référence, c'est plutôt la parole de Djely, celle qu'on recueille quand on rencontre un sage, une autorité morale, et qui nous renvoie à nos valeurs intrinsèques », clarifie Boubacar Sanso Barry. « Notre défi est de nous extraire des antagonismes politiques, parfois ethniques en Guinée, de ne parler ni au nom de, ni contre, et enfin de ne jamais dépendre d'un lobby politique ou financier », ajoute-t-il. Fondé sur des ressources propres, Le Djely commence à engranger quelques revenus grâce à la publicité et à des contrats à plus longue durée avec certaines institutions. L'équipe, composée de cinq journalistes, propose chaque jour des reportages et des articles entre analyse et éditorial, très souvent inspirées par l'actualité panafricaine. « Nous assumons notre propre point de vue et l'objectif n'est pas de faire du politiquement correct. Nous sommes sans concessions sur les dérives démocratiques et la corruption des élites. Nos limites sont l'éthique, la déontologie, et la prise en compte de la nécessaire unité du pays quand on traite l'actualité en Guinée », précise Boubacar Sanso Barry.

La Nouvelle Tribune (Bénin), éternel « quotidien d'opposition »

Le quotidien béninois, créé en 2001, a lancé sa version internet en 2008. Le site d'info évolue à partir de 2014 vers une rédaction et un mode de fonctionnement propres, grâce à la publicité, et à la faveur d'une meilleure pénétration d'Internet dans les villes béninoises. « En neuf ans, notre lectorat a augmenté de 1 000 %, avec l'explosion des supports de téléphonie mobile », indique le responsable du site La Nouvelle Tribune Euloge Foly, soucieux de mentionner aussi que le Web est « le seul domaine où la presse africaine a réussi à fidéliser des lecteurs ». « La presse occidentale a mis du temps à s'adapter aux changements, ce qui nous a laissé le temps de nous établir et de gagner la confiance de nos lecteurs », note-t-il. Aujourd'hui, l'équipe du site se compose de près de 10 personnes, dont 4 journalistes. Comme Bénin Monde Infos, La Nouvelle Tribune mise sur les réseaux sociaux (Facebook, Twitter, Whatsapp) pour favoriser sa diffusion. Elle y vulgarise ses contenus et joue la carte de l'interaction avec les internautes. Taxée à chaque changement de gouvernement de « journal d'opposition », La Nouvelle Tribune a une ligne éditoriale « bien plus simple », rectifie, amusé, le responsable du Web : « On ne cherche pas à s'aligner systématiquement sur des positions politiques, on défend avant tout le bien-être du peuple. » Le journal publie des reportages, des analyses, mais aussi des tribunes.

Le Pays (Burkina Faso), sarcastique et impertinent

Le quotidien Le Pays, basé à Ouagadougou, a été créé le 3 octobre 1991. Il compte une vingtaine de journalistes mais aussi des correspondants et des collaborateurs ponctuels. Indépendant, il s'autofinance avec les recettes publicitaires. Le site d'infos a quant à lui été créé il y a une dizaine d'années, comme un prolongement sur le Web du journal « papier ». Son équipe a été renforcée récemment avec notamment un webmestre et un journaliste chargé d'actualiser les contenus. Les articles du Pays, qualifiés de « commentaires » par le directeur des rédactions Boundi Ouoba, proposent une analyse politique pointue de l'actualité africaine et internationale. À l'instar d'autres titres burkinabés, l'ironie y est très présente. Mais à la question de savoir si cette marque de fabrique d'une certaine presse nationale est culturelle, Boundi Ouoba répond par la négative. Il revendique toutefois le souhait d'« égratigner certains acteurs politiques, leur incurie ou leur turpitude ». « Ce trait virulent sarcastique est aussi une contribution au changement sur le continent africain », ajoute-t-il.

Fréquentation en hausse

Comment ces sites d'infos peuvent-ils se maintenir alors que la pénétration d'Internet reste très faible en Afrique de l'Ouest ? Elle s'établit à 1,8 % en Guinée, 5,6 % au Bénin et 10,2 % au Burkina Faso selon Internet Live Stats. L'accès à Internet est plus élevé au Sénégal (23,4 %) et en Côte d'Ivoire (22 %), deux pays qui ont accueilli les pionniers ouest-africains de la presse en ligne (Seneweb et Abidjan.net) dès la fin des années 90. Toutefois, il reste en deçà des chiffres recueillis au Nigeria ou au Kenya, où près de la moitié de la population a accès à Internet. Par ailleurs, les coûts d'accès à Internet sont plus élevés en Afrique de l'Ouest.

Malgré ces contraintes, les médias dont nous avons recueilli le témoignage assistent à un accroissement et à un élargissement de leur lectorat. « 60 % de nos lecteurs se connectent par leurs téléphones portables », souligne le Béninois Euloge Foly, rappelant l'essor de la téléphonie mobile sur le continent. La fréquentation de ces médias augmente également grâce aux vecteurs que sont la francophonie et les diasporas. « Aujourd'hui, on nous lit dans les quatre coins du monde avec une forte concentration en Afrique et en France », note Bénin Monde Infos.

Source: http://afrique.lepoint.fr/

 

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